14 octobre – 20 novembre 2004
Exposition réalisée par les Archives de la construction moderne – EPFL et de la Barragán Foundation, Birsfelden
L’exposition que les Archives de la construction moderne consacrent aux jardins de Ferdinand Bac et de Luis Barragán se tiendra à l’automne sur le site de l’EPFL, en parallèle à la manifestation Lausanne jardins 2004 qui conduit ses visiteurs du centre de Lausanne à la découverte de l’ouest de l’agglomération.
L’oeuvre de ces deux créateurs de jardins sera mise en résonance par des documents qui seront proposés pour la première fois au public Suisse romand, dessins, plans et photographies provenant d’archives privées et publiques. L’originalité de l’exposition réside dans la confrontation de documents issus de la production des deux artistes : il s’agit d’une véritable « première».
Né à Stuttgart Ferdinand Bac (1859-1952) est, par la main gauche, le petit-fils de Jérôme Bonaparte, roi de Westphalie ; il occupera une position de passeur entre les traditions allemande et française. Homme d’une grande culture, il s’adonne avec talent à la caricature et publie de nombreux ouvrages, anecdotes sur les personnages de son enfance ou histoire de villes allemandes et italiennes. Installé dans le Midi pour raison de santé, il entreprend tout d’abord d’aménager les jardins de la villa Croisset (1912), puis ceux des Colombières à Menton. Il transforme cette ancienne bâtisse en somptueuse résidence méditerranéenne au milieu d’un jardin où chaque parterre est inspiré d’un pays de la Méditerranée. Il consigne ses réflexions dans plusieurs ouvrages relatant ses travaux, ses envies et ses projets.
Est-ce ma vocation ? Je ne croyais pas que faire des jardins était ma mission. Je ne me sentais prédestiné à rien, ni à être historien, ni artiste, ni géomètre. J’obéissais à ma propre nonchalance qui s’est tournée en ardeur, à cette petite flammèche qui est devenue un brasier, à cet amusement qui s’est transformé en vocation.
La première réalisation de l’architecte mexicain Luis Barragán (1902-1988) dans le domaine du paysage public est le Parque de la Revolución à Guadalajara en 1934. Elle fait suite à une série de projets pour des résidences privées conçus au retour de son premier voyage en Europe en 1925. Il s’était alors familiarisé avec les écrits et le travail de Ferdinand Bac dont les jardins à la fois réels et imaginaires deviennent une source d’inspiration durable pour le jeune architecte.
Lors de ses premières expériences à Guadalajara, son attention est déjà centrée sur la relation entre l’extérieur et l’intérieur, les espaces clos et ouverts ; il porte un soin particulier aux jardins, aux patios et aux terrasses.
En 1941 à Mexico, il crée ses premiers jardins privés sur calzada Madereros : suite d’espaces cloisonnés, à travers lesquels le visiteur est conduit comme dans une expérience cinématique, ponctuée de sculptures, d’objets, de plantes et d’« objets trouvés » qui complètent et mettent en valeur les conditions préexistantes du site.
Suite à cette expérience, une concession pour un terrain dans le faubourg sud de Mexico appelé El Cabrío, permet à Barragán de pousser plus loin sa réflexion. Il profite de ce paysage volcanique et de sa végétation singulière pour créer trois jardins contigus où rochers et gazon, feuillage et cactus, pierre, sable et eau sont habilement combinés pour former un jardin pleinement intégré dans le paysage naturel.
Pour le projet de El Pedregal (1945-1954) qui transforme plus de six millions de mètres carrés de terre inhospitalière en une zone résidentielle sophistiquée, Barragán repousse les limites traditionnelles de la conception du jardin à l’échelle du territoire, tout en incluant visuellement le profil lointain des volcans et des sierras.
Une approche semblable guide sa conception des complexes résidentiels de Las Arboledas (1958-1968) et Los Clubes (1961-1972), imaginés comme un antidote à une vie urbaine agitée et stressante. Le projet est centré sur le cheval et les cavaliers par la création d’allées et de fontaines spécialement aménagées pour les activités équestres. Le jeu entre les éléments linéaires horizontaux et de larges plans verticaux, marque la composition de mises en scène visuelles. Si, dans le travail de Barragán, El Pedregal symbolise la découverte et la valorisation du territoire mexicain, Las Arboledas et Los Clubes proposent une interprétation de l’hacienda mexicaine, où la mémoire du ranch et de la campagne liés à sa jeunesse produisent une synthèse personnelle puissante et évocatrice.