Rythmes en Sciences Sociales

Programme 

Le programme du colloque est désormais disponible.

Argumentaire 

Depuis quelques annĂ©es la question du rythme est de retour dans les publications en sciences sociales : accĂ©lĂ©ration (Rosa 2010), tyrannie et culte de l’urgence (Auber 2009), burn out (Coeugnet et al. 2011) et pressions temporelles (Szollos 2009). La notion de rythme est Ă©galement mobilisĂ©e comme prisme de lecture des temporalitĂ©s urbaines (Amin et Thrift 2002) du rapport entre corps et espace (Edensor 2012)et des diffĂ©rences culturelles (Levine 1997). Dans ses dĂ©finitions usuelles, le rythme renvoie Ă  une idĂ©e d’ordre et de rĂ©gularitĂ©. EnvisagĂ© comme un mouvement rĂ©gulier, pĂ©riodique, cadencĂ©, le rythme fait rĂ©fĂ©rence Ă  des retours, et Ă  des intervalles rĂ©guliers dans le temps, d’un fait, d’un phĂ©nomĂšne ou d’un comportement. L’enjeu du colloque est de montrer que le rythme est une notion bien plus riche, polysĂ©mique, complexe et fluctuante (Michon 2010) en prenant nos distances avec une conception qui se limite Ă  l’ordre du mouvement. Il apparait possible de repartir du terme « rhuthmos » qui permet d’intĂ©grer les mouvements irrĂ©guliers, spontanĂ©s ou d’autres formes d’organisations des temps. Le rythme s’impose comme une notion heuristique pour analyser, observer, reprĂ©senter, et re-penser une « sociĂ©tĂ© liquide » (Bauman 2013), des « mondes » en « mouvement » (Drevon et al 2017) et leurs « paradoxes » (Kaufmann 2008), une notion qui permet de dĂ©passer le tournant de la mobilitĂ© (Urry 2012) et de concevoir de nouvelles grilles de lecture des sociĂ©tĂ©s contemporaines.

La notion de rythme se situe Ă©galement au centre des approches critiques de la postmodernitĂ©. Le rythme y est principalement utilisĂ© comme un rĂ©vĂ©lateur de l’accĂ©lĂ©ration. Hartmut Rosa par exemple, dĂ©nonce l’accĂ©lĂ©ration technique et sociale qui amĂšnent Ă  l’aliĂ©nation des individus (Rosa 2013). Ces formes de l’aliĂ©nation renvoient notamment au culte de l’urgence (Auber 2009), aux pressions temporelles multiples (Szollos 2009) et plus largement Ă  la saturation (Citton 2014) au-delĂ  du mĂ©tissage des temps (vie professionnelle vs vie familiale) et de l’expansion de certains budgets temps d’activitĂ©s comme les loisirs (Viard 2002), les chercheurs observent une densification des rythmes de vie amplifiĂ©e par les multiples injonctions aux changements d’ordre professionnel, familiale et spatial (Kaufmann 2008).- Du point de vue thĂ©orique, l’approche par les rythmes permettrait de jeter un regard neuf sur les modes de vie au sujet desquels les contours des typologies classiques (consommation, mobilitĂ©, aspirations) deviennent de plus en plus flous. Des approches rythmiques permettraient de rĂ©vĂ©ler les traits temporels des sociĂ©tĂ©s et d’en dĂ©gager les harmonies ainsi que les dissonances et leurs implications sur les individus et les collectifs. Le rythme apparait Ă©galement comme un rĂ©vĂ©lateur de controverses. En rĂ©action Ă  l’accĂ©lĂ©ration des rythmes de vie, des initiatives qui s’inscrivent dans le mouvement slow (Heike et Knox 2006) apparaissent de plus ne plus saillantes. Ces initiatives proposent de ralentir le rythme au travers de l’éloge de la lenteur, des interstices et de la vacance. Les rythmes de « ville » apparaissent Ă©galement comme des Ă©lĂ©ments d’accroche de ces initiatives. Elles militent pour un ralentissement et un apaisement en particulier dans les espaces publics. Ces initiatives se situe Ă  la base des discussions autour de l’apaisement et de la fabrique de nouveaux communs temporels (Gwiazdzinski 2016) dans une perspective de retour Ă  la lenteur (Sansot 1998).

Les controverses qui se matĂ©rialisent au travers de ces mouvements antagonistes Ă  l’accĂ©lĂ©ration tĂ©moignent des enjeux politiques soulevĂ©s par la notion de rythme qui donne Ă  imaginer de nouvelles pistes pour le renfoncement des politiques publiques temporelles et le dĂ©veloppement du chrono-amĂ©nagement (Gwiazdzinski 2014, 2018). La notion de rythme pose diffĂ©remment une question centrale des sciences sociales autour de la composition d’une vie en sociĂ©tĂ©, dans un « monde liquide » (Bauman 2013), marquĂ© par l’individualisation et la cohabitation des modes de vie. Le colloque fait le pari que la mobilisation du rythme dans les sciences sociales Ă  partir d’une conception large de la notion est heuristique. Le rythme revĂȘt une dimension sensible et expĂ©rientielle mais aussi critique des parcours dans le prisme spatio-temporel de la « Time Geography  » (HĂ€gerstraand 1970) et des budgets-temps quotidiens, les essais de « politiques des temps » (Mallet 2013), de « chronopolitique » voire « d’urbanisme temporaire et temporel » (Pradel, 2012 ; Gwiazdzinski 2007). Elle ouvre Ă  l’éprouver, au sens, Ă  la prĂ©sence, Ă  la « corporĂ©itĂ© et Ă  « l’exister » au sens d’Henry Maldiney. Elle permet d’éclairer la dynamique des relations entre individus, espaces et sociĂ©tĂ©s, offrant un regard original sur les questions d’émancipation et de domination. Elle met en Ă©vidence les tensions dans nos vies et dans nos villes entre « rĂ©pĂ©tition » (Deleuze 1972) et « innovation », besoin de stabilitĂ© et besoin de perturbation. Elle concrĂ©tise et unifie le champ de l’analyse des mobilitĂ©s en permettant de rĂ©concilier la dĂ©finition de la mobilitĂ© comme franchissement de l’espace propre Ă  la gĂ©ographie avec celle de la sociologie comme transformation dans le temps (Kaufmann 2014).

Propositions de communications

Les propositions de communication traiteront de l’utilisation de la notion de rythme dans les domaines, de la Sociologie, de la GĂ©ographie, des Sciences Politiques, de l’Économie et de la Psychologie. Les propositions sont d’ordre thĂ©orique, mĂ©thodologique et artistiques. Les approches critiques et les controverses sont particuliĂšrement attendues pour nourrir le dĂ©bat. Les communications prendront diffĂ©rentes formes :

  • Un rĂ©sumĂ© long de 5 000 signes
  • Une image accompagnĂ©e d’un texte explicatif de la rĂ©flexion
  • Une vidĂ©o de 3 minutes
  • Une proposition de performance chorĂ©graphique ou artistique
  • Une musique accompagnĂ©e d’un texte explicatif de la rĂ©flexion

Les communications prendront la forme de sĂ©ances de discussion par groupe thĂ©matique. Chaque communicant sera amenĂ© Ă  prĂ©senter briĂšvement sa rĂ©flexion sous la forme qu’il juge la plus adaptĂ©e.

Publications

Les contributions seront publiées dans la revue espacestemps.net

Calendrier

Les propositions de communications sont attendues avant le 22 février. 
Elle devront ĂȘtre envoyĂ©es Ă  cette adresse : [email protected] 

Elles seront évaluées par le comité scientifique de la revue espacestemps.net. 
Les auteurs seront informés de la décision du comité scientifique avant le 15 mars.

Le colloque aura lieu les 9 et 10 mai 2019 à l’EPFL.

Comités

Direction scientifique 

  • Guillaume Drevon (GĂ©ographie)

ComitĂ© d’organisation 

  • Boris Beaude (GĂ©ographie, numĂ©rique)
  • Ceyda Bakbasa Bosson (Études urbaines)
  • Garance ClĂ©ment (Sociologie)
  • GaĂ«l Chareyron (Informatique)
  • Jean-Nicolas Fauchille (AmĂ©nagement de l’espace)
  • Christian Grataloup (GĂ©o-histoire)
  • Luc Gwiazdzinski (GĂ©ographie)
  • Marc Dumont (GĂ©ographie, AmĂ©nagement)
  • Vincent Kaufmann (Sociologie urbaine)
  • Jacques LĂ©vy (GĂ©ographie, AmĂ©nagement de l’espace)
  • Igor Moullier (Histoire moderne)
  • Patrick Poncet (GĂ©ographie, intelligence spatiale)
  • Florence Graezer Bideau (Anthropologie)
  • Emmanuel Ravalet (Études urbaines)

Comité scientifique 

  • Mounia BennaniChraĂŻbi (Études politiques)
  • Mathieu Berger (Sociologie urbaine)
  • Michel Carrard (Urbanisme, AmĂ©nagement)
  • JĂ©rĂŽme Chenal (Urbanisme, Planification urbaine)
  • Saskia Cousin (Anthropologie)
  • Émilie Da Lage (Sciences de la communication)
  • Olivier Dubos (Droit public)
  • Elieth Eyebiyi (Sociologie, Anthropologie)
  • Daniel Gabay (MathĂ©matique sociale)
  • Luc Gwiazdzinski (GĂ©ographie)
  • Magali Hardouin (GĂ©ographie)
  • Sandra Laugier (Philosophie)
  • JoĂ«lle Le Marec (Science de la communication)
  • Barbara LaurentLucchetti (Études urbaines)
  • JeanPaul MarĂ©chal (Sciences Ă©conomiques)
  • Alfonso Pinto (GĂ©ographie)
  • Antonin Margier (Études urbaines)
  • VĂ©ronique Mauron (Histoire de l’art)
  • Joseph Morsel (Histoire)
  • Khalid Mouna (Anthropologie)
  • HĂ©lĂšne Noizet (Histoire mĂ©diĂ©vale)
  • PĂĄl NyĂ­ri (Anthropologie)
  • Luca Pattaroni (Sociologie)
  • Yves Pedrazzini (Sociologie, Anthropologie)
  • Alfonso Pinto (GĂ©ographie)
  • HervĂ© Regnauld (GĂ©ographie)
  • Jean Rochat (Histoire Ă©conomique)
  • Alvir Spomenka (Science du langage)
  • Magali Talandier (GĂ©ographie Ă©conomique)
  • Arnaud Valence (Philosophie)

Contact : [email protected]