Le Temps a consacré son dossier immobilier du 26 janvier à cette question, un excellent dossier réunissant de nombreux témoignages des milieux immobiliers et bancaires. On les comprend mieux si on distingue clairement entre deux marchés: celui des immeubles de rendement et celui des immeubles de jouissance.
Les immeubles de rendement sont les immeubles regroupant des surfaces louées, principalement les appartements locatifs qu'occupent encore plus de 60% des ménages de ce pays. Les immeubles de jouissance sont les appartements et maisons individuelles qu'occupent les autres en en étant propriétaires.
Au fond, la logique économique qui détermine l'évolution des prix des deux types de biens est la même: si la baisse des taux d'intérêt fait qu'aujourd'hui la détention d'un bien immobilier coûte en frais financiers et autres frais 3.5% de son prix contre 7% il y a 20 ans, alors on peut payer deux fois plus pour l'acheter. Les propriétaires d'immeubles de rendement obtiennent encore aujourd'hui un rendement situé en moyenne entre 4 et 6% alors que le tribunal fédéral a jugé que 2.5% n'étaient pas abusifs au sens du droit du bail. Il y a donc encore de la marge pour que les prix des biens immobiliers de rendement augmentent. Les rendements devenus négatifs sur d'autres placements sans risques accentuent encore l'attrait des placements immobiliers.
Ceci est en principe aussi valable pour les immeubles de jouissance mais encore faut-il que les acheteurs puissent les payer. Il ne s'agit pas de fonds immobiliers et caisses de pension aux moyens gigantesques, comme pour les immeubles de rendement, mais de ménages de plus en plus ordinaires. Bien qu'il soit avantageux pour eux de devenir propriétaires et profiter enfin de la baisse des taux d'intérêt, encore faut-il qu'ils puissent réunir 20% du prix d'achat en fonds propres et que leur revenu soit suffisamment élevé pour pouvoir assumer les charges calculées avec un taux d'intérêt fictif de 4 à 5%. Ces contraintes de financement fixent un plafond aux prix des immeubles de jouissance, un plafond qui a été atteint et qui va devenir de plus en plus contraignant avec le ralentissement conjoncturel qui se prépare.
En résumé, les prix des immeubles ne sont pas trop élevés en moyenne nationale (il y a évidemment des exceptions locales) mais seuls les prix des immeubles de rendement peuvent encore augmenter parce qu'ils intéressent des acheteurs aux poches très profondes.