En nommant Hoensung Lee à sa tête (et je suis triste pour mon collègue et ami Thomas Stocker, qui aurait aussi fait un excellent directeur), le Groupe intergouvernemental d'experts sur l'évolution du climat a reconnu la riche contribution de la science économique dans la lutte contre les changements climatiques. Souvenons-nous que la limite des 2°C de réchauffement global à ne pas dépasser sous peine d'exposer le climat planétaire à des dérèglements imprévisibles a été formulée la première fois par un économiste, William Nordhaus, en 1977, avant d'être reprise et popularisée par Hans Joachim Schellnhuber. Souvenons-nous aussi de l'impact du rapport de l'économiste anglais Nicholas Stern en 2007, lorsqu'il avait montré qu'il coûterait beaucoup plus cher de ne rien faire pour éviter les changements climatiques que de prendre les mesures nécessaires. Aujourd'hui, le message le plus fort est peut-être celui qui a été lancé par Malte Meinshausen (climatologue et économiste formé en Suisse) et ses collègues dans la revue Nature en 2009, lorsqu'ils ont formulé un budget d'émissions de gaz à effet de serre à ne pas dépasser pour avoir de bonnes chances de limiter le réchauffement à 2°C. Un budget que les pays signataires de la Convention sur le climat vont se répartir à Paris à la fin de cette année. Ces exemples montrent pourquoi les économistes jouent un rôle aussi important dans le domaine climatique: ils osent articuler des chiffres précis là où leurs collègues des sciences dures évoquent prudemment des fourchettes et de vagues probabilités. Ces exemples montrent aussi que les économistes ne sont de loin pas tous ces avocats des intérêts économiques dominants qu'on leur reproche souvent d'être.