Christophe Reymond, directeur du centre patronal vaudois, a bien relevé dans sa contribution d'invité (24 Heures du 18 juin) que nos autorités ont adopté des plans et des lois pour la protection du climat, que des milliers d'entreprises se sont non seulement engagées à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre, mais ont pris de réelles mesures et s'empressent de le communiquer urbi et orbi. Mais les jeunes demandent plus. Pourquoi? Parce qu'ils ne voient pas les effets de ces mesures. Ils voient toujours plus de voitures sur nos routes (plus de 300'000 sont immatriculées chaque année, dont 1% de voitures électriques). Ils voient des grues partout sur les chantiers qui continuent de couler du béton. Ils voient des usines avec leurs grandes cheminées. Ils voient des foules qui se pressent dans les aéroports et des avions qui strient le ciel. Une sortie rapide des énergies fossiles ne ressemble pas à cela.
Comment comprendre cette différence entre les chiffres qui suggèrent que la Suisse réduit ses émissions et ces observations qu'il y a de plus en plus de sources d'émissions? Les chiffres sont clairs: les émissions de CO2 de la Suisse ont baissé de 15% entre 2000 et 2017, malgré une hausse de la population de 18% et de l'activité économique de 34% sur la même période. C'est remarquable, mais à ce rythme nous cesserons de brûler des énergies fossiles au siècle prochain, ce qui est beaucoup trop tard. Les résultats des plans, des lois, des engagements des entreprises et de nos efforts individuels sont presque invisibles parce qu'il s'agit surtout de mesures marginales. Les entreprises prennent les mesures pour réduire leur consommation d'énergie qui sont remboursées en quelques années grâce aux économies faites (il leur suffit de prendre les mesures amorties en quatre ans pour être exonérées de la taxe sur le CO2!). Les cimenteries brûlent des vieux pneus à la place de résidus de raffinerie. Les moteurs des voitures deviennent chaque année un peu plus efficients grâce aux efforts faits par les constructeurs hors du pays. Nous avons estimé que les émissions de CO2 de la Suisse se seraient stabilisées malgré la croissance démographique et économique par le seul effet des progrès techniques. La politique climatique et énergétique a juste réussi à transformer cette stabilisation en modeste diminution.
Alors oui, les émissions de CO2 ont commencé à baisser, mais beaucoup moins que ce que le monde attend d'un pays aussi riche et doté du savoir-faire pour devenir un leader de la transition énergétique.