Ma contribution à la recherche concerne les rétroactions climat / cycles biogéochimiques, via l’étude de l’évolution de la composition atmosphérique en gaz à effet de serre (GES) grâce aux carottes de glace et à l’air interstitiel du névé polaire, mais aussi par l’étude des GES en milieu aquatique (océans, lacs).
J’ai pu reconstruire les tendances temporelles du rapport de mélange et de certains rapports isotopiques des GES méthane (CH4), dioxyde de carbone (CO2), protoxyde d’azote (N2O), ozone (O3) et certains composés organo-halogénés, mais aussi du monoxyde de carbone (CO) qui joue un rôle essentiel dans la chimie atmosphérique. Mes points focaux ont été à la fois l’ère Quaternaire et la période industrielle. Dans un autre champ d’études, j’ai exploré l’état et la dynamique passée du système climatique en estimant l’évolution des températures et accumulations passées en Antarctique ou encore en évaluant les relations de phase entre climat polaire et évolution des GES. Au cours de ces dernières années, je me suis investi dans le champ de l’instrumentation en milieu aquatique et l’étude de processus biogéochimiques en milieux océaniques ou lacustres par l’analyse in-situ et haute résolution de gaz dissous.
Les avancées les plus importantes que l’on pourrait retenir de ce travail se résument ainsi :
- La reconstruction pionnière des GES dans l’atmosphère étendue jusqu’aux derniers 800.000 ans, démontrant l’importance de l’impact anthropique récent, le fort couplage climat / CH4 aux périodicités orbitales, le rôle majeur des sources de basses latitudes dans son bilan naturel ;
- La quantification de la dynamique des événements climatiques rapides au cours d’une glaciation, dont la mise en évidence de leur étendue globale, et la première démonstration qu’ils impliquent une bascule énergétique bipolaire ;
- Des “premières” dans l’étude des rapports isotopiques des GES et du CO dans le névé et la glace, aboutissant à des conclusions biogéochimiques importantes : identification des sources anthropiques responsables de l’augmentation récente du CH4 (isotopie du carbone) et du N2O (isotopie de l’oxygène et de l’azote) ; mise en évidence d’un rôle majeur de l’océan profond sur l’évolution glaciaire-interglaciaire du CO2 (isotopie du carbone) ; révélation d’une modulation temporelle d’un facteur deux des feux de biomasse dans l’hémisphère sud entre 1600 et 1900 (isotopie du carbone et de l’oxygène du CO) ; démonstration que l’ozone dans la troposphère a augmenté de moins de 40% depuis la période préindustrielle (isotopologue doublement substitué de l’oxygène).
- La révolution méthodologique apportée par l’application de la spectrométrie laser OF-CEAS aux analyses des gaz dans la glace et dans les océans et lacs : projet ERC Advanced Grant et la sonde in-situ innovante SUBGLACIOR, dépôt d’un brevet CNRS pour le dérivé océanographique de cette sonde (SUBOCEAN) ; projets SATT et ERC Proof of Concept pour concevoir d’autres instruments océanographiques et progresser vers leur industrialisation ; application conduisant à une révision majeure des flux de méthane à l’interface sédiment-océan dans le détroit de Fram.
L’essentiel de mon temps de 2018 à 2022 était consacré à exercer la fonction de Directeur de l’Institut polaire français Paul-Emile Victor (IPEV), en charge de sélectionner puis d’accompagner opérationnellement les projets de recherche français dans les régions polaires. Elle s’accompagnait également de la responsabilité de Chargé de mission aux affaires polaires auprès de la direction générale déléguée à la science du CNRS.
Depuis juillet 2021, j’assure la présidence de la Fondation Ice Memory, qui vise à créer un sanctuaire international d’échantillons de glaciers condamnés à disparaître en raison du changement climatique, stockés en Antarctique pour les générations futures de chercheurs.